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Il a fallu l'interpeller au détour d'un couloir du Palais pour enfin vraiment savoir et recueillir ses impressions...car il est comme ça, Yannick Bokolo ! toujours aussi discret en dépit d'une carrière longue de 16 années passées au sein de l'élite du basket tricolore, une carrière qu'il a bel et bien décidé de stopper cet été avec près de 550 matches LNB au compteur et un joli palmarès (voir ci-dessous). International à 92 reprises, le désormais ex-capitaine des V&B qui fêtera ses 34 ans ce mercredi et qui a décidé de rester habiter à Pau avec sa famille, a accepté de revenir quelques instants sur son parcours exceptionnel.

 

"Alors Yannick c'est sûr, tu raccroches pour de bon ?"

"C'est une décision mûrement réfléchie et même si on a envie de poursuivre l'aventure, surtout dans un endroit où on se sent bien, c'est pour d'excellentes raisons. Cela relève de l'extra sportif exclusivement et je dirais que c'est avant tout pour prendre soin de ma famille. Comme celle-ci passe avant tout le reste, c'est sans regret que j'ai pris la décision. Le club avait émis le souhait que je prolonge mais je savais que je n'allais plus être impliqué de la même façon dans mon travail et je ne voulais pas manquer de professionnalisme vis à vis de l'Elan."

"As-tu déjà conscience de ton nouveau statut de retraité ?"

"Non, je ne réalise vraiment pas encore car dans tous les cas j'aurais été en arrêt en ce moment. C'est plus en août ou en septembre que ça va commencer à faire bizarre, surtout lorsque je vais voir les autres reprendre le chemin des parquets...je le sens quand même un peu des fois quand je me dis : oh, mais dis donc, t'as le temps là ! (rire). Je fais des choses encore comme si j'allais reprendre mais en fait non..."

retraite2Yannick Bokolo aura porté le maillot palois durant 5 saisons (2014-2019) ©Eric Traversié

"Quand on regarde ton parcours, on est forcément marqué par le fait que tu n'as connu que trois clubs différents en 16 ans : Le Mans (5 saisons), Gravelines-Dunkerque (6) et l'Elan (5). Une sacrée exception par les temps qui courent...."

"Comme on dit, il y a plusieurs types de réussites :  celles qui sont spontanées comme un feu d'artifice et puis celles qui se bâtissent avec le temps. Les miennes, ce sont plutôt celles-là ! C'est vrai que j'aurais peut-être pu m'adapter à d'autres parcours, avec beaucoup plus de clubs fréquentés mais ce n'était pas mon profil. Si javais dû le faire, cela aurait été à cause du marché des joueurs, pas de moi. Je me souviens qu'après avoir signé mon premier contrat de quatre ans au Mans, je n'imaginais rien au-delà de ces quatre années. Dans ma tête, j'avais l'impression que j'allais jouer toute ma vie au MSB. Dans chacun de mes trois clubs, mes envies de bouger ont été vraiment rares."

"Qu'est-ce que tu retiens en priorité de cette longue vie de basketteur ?"

"Je m'attendais à cette question et pourtant j'ai du mal à y répondre car je n'aime pas mettre telle ou telle chose en avant. Je dirais tout ce que je n'aurais pas pu accomplir si je n'avais pas fait ce métier comme le fait de pouvoir prendre part aux Jeux Olympiques ou de porter le maillot de l'Equipe de France. Ce n'est pas que je veux dénigrer ce que j'ai fait en club mais disons que ça, c'était un peu la route que je m'étais tracée même si je me voyais simplement jouer en Pro B à la base. L'Equipe de France, tout ce qui est arrivé de manière exceptionnelle, c'est ça que je retiens."

"et le moment le plus fort ?"

"Le jour où on gagne le titre avec Le Mans en 2006. C'est la première fois que je me suis senti comme un vrai joueur de basket professionnel. Moi, je ne me suis jamais vu comme un international. En Equipe de France, je me voyais toujours sur un siège éjectable., comme  le gars qui est là parce qu'il a eu une invitation, une place gratuite. Une fois, je me souviens avoir été le seul mec du groupe à évoluer en France ! Il y avait comme un contraste énorme avec les autres, même lors des discussions à table : moi je me battais pour acheter une voiture sur Le Bon Coin pendant que les autres parlaient de retaper des "Ferrari" (rire)...Aujourd'hui, je vois mon nombre de sélections mais je ne me suis jamais considéré comme un élément à plein temps des Bleus. Même si je ne viens pas de là, je m'estime un peu comme le gars de la campagne, tu sais, le gars qui s'en fout en fait. Je pouvais gagner de l'argent ou pas, le plus important pour moi a toujours été d'être heureux et d'avoir du fun là où j'étais."

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Yannick Bokolo a disputé son dernier match en carrière face à Nanterre 92 à l'occasion des playoffs 2019 ©Eric Traversié

"Comment Yannick Bokolo a évolué au fil du temps et de ses expériences ?"

"Au début, quand tu arrives dans une équipe, tu regardes comment ça se passe et tu apprends. A Gravelines, j'ai compris que c'est nous, les joueurs, qui avons à mettre en place certaines choses pour que tout se passe bien, comme aller parler au gars qui ne parle pas dans le vestiaire etc...tout cela, je l'ai mis en place pleinement en fait uniquement quand je suis arrivé à Pau. Avant j'étais plus spectateur. Il y avait toujours quelqu'un qui mettait tout ça en place et j'en profitais. A Pau, je me suis dit, c'est à moi de le faire maintenant."

"D'où ce rôle de capitaine de l'Elan..."

"Je n'avais justement jamais voulu être capitaine dans les équipes où j'étais passé. Je savais que cela allait me faire franchir un cap mais ce poste à responsabilités, cela ne correspondait pas avec ce que je voulais faire...tu vois le capitaine, faut qu'il soit toujours respectable, sérieux...et puis non, arrivé ici, je me suis dit, je serais un capitaine à ma manière ! J'ai appris avec le temps que je pouvais rester moi-même tout en ayant un poste important."

"A l'heure de tourner la page, as-tu quelques regrets ?"

"Je n'en ai pas vis à vis de la NBA, même si c'est passé tout près pour moi, parce que je sais que j'ai tout donné et que je jouais à l'époque mon meilleur basket mais quand on a des objectifs, on en a forcément. Personnellement, c'est le fait d'être passé à côté de certains titres en club au BCM comme à l'Elan. Quand tu sens que tu peux accrocher quelque chose comme cette année ou l'an passé et que tu ne sais pas trop au final ce qui manquait, ouais, là c'est frustrant. Après je n'oublie pas encore une fois qu'en sortant de l'INSEP, je voulais aller en Pro B...je ne pensais même pas être pro et plutôt continuer les études. Pour moi du coup, tout ce que j'ai vécu, c'est du plus !"

"Jamais tu n'avais rêvé atteindre un si haut niveau alors ?"

"JAMAIS ! pourtant j'avais bien un poster de Tariq Abdul-Wahad dans ma chambre mais pas une seconde je ne me serais imaginer porter un jour le maillot de l'équipe de France, vraiment...et j'ai tout le temps essayé de ne pas trop le montrer et de faire comme si tout cela était normal au final."

"Yannick Bokolo retraité, tu l'imagines comment ?"

"J'espère pas gros déjà !! je me vois toujours avec le même fun et avec la volonté de transmettre tout ce que j'ai pu apprendre dans les vestiaires et sur les parquets mais cette fois au sein d'une entreprise. Je sais que je ne vais pas retrouver la même chose mais je ne me vois pas aller bosser à la Poste en étant comme tous les postiers. Moi ma Poste, elle sera différente des autres ! pour l'heure j'effectue une formation en informatique mais je ne me limite pas à un seul secteur d'activité. De par mon expérience dans le basket, où je m'étais limité à certaines choses, j'ai vu que cela pouvait évoluer. Je n'ai pas encore la fibre mais je me vois bien comme un entrepreneur. Ma force a toujours été celle de pouvoir s'adapter alors peu importe où je serais."

"Tes potes t'ont déjà contacté suite à l'annonce de ton départ ?"

"Alain (Koffi) , Jean-Michel (Mipoka) bien sûr oui mais ils le savaient déjà... Cyril Akpomedah m'a mis un truc du genre Game of Thrones avec un message : "passe de l'autre côté avec nous, tu verras c'est pas mal non plus ! (rires). je sais que j'aime le basket, j'ai grandi avec mais je n'ai pas non plus la même fibre que certains...je ne suis pas comme ces pères qui forcent leurs fils à faire tel ou tel sport, bien au contraire. Je n'aimerais pas en fait que mes enfants fassent du basket. Je préfère qu'ils suivent leur propre voie."

"Et une reconversion dans le milieu, tu y as pensé ?"

"Oui mais coach est un boulot trop difficile pour moi. Assistant peut-être, quand tu es planqué derrière (rire). Tu sais, j'ai vu les entraîneurs fonctionner. C'est du non stop. Tu manges, tu vois des ballons de basket dans ton assiette. Ou alors, comme j'ai dit auparavant : ce sera à ma manière. Je ne ferme jamais de porte mais bon, coach, pas longtemps alors !"

"Aura-t-on le plaisir de te revoir dans les tribunes du Palais dès la reprise du championnat puisque tu as annoncé rester vivre à Pau avec ta famille ?"

"Allez une confidence : je trouve que depuis les tribunes, un match c'est long ! bon là je reviendrais car pour que j'accroche, il faut que je connaisse des gens sur le parquet...j'ai intérêt à revenir vite quand même, car après je ne connaitrais plus personne !"

 

Le palmarès de Yannick Bokolo

  • Champion de France (2006)

  • Vainqueur de la Coupe de France (2004) 

  • Vainqueur de la Semaine des As (2006, 2011) 

  • Vainqueur de la DisneyLand Leaders Cup (2013) 

  • 4 participations au All Star Game (2004, 2006, 2008, 2010)